Fatigue

Quatrième semaine - p.2

Mais le pire, au stade où j'en suis, c'est au niveau du nez que ça se passe. Comme nos poils recommencent à pousser, en même temps que la remise en route des sécrétions naturelles, quand la sécheresse au niveau du nez se dissipe, j'éternue, mon nez coule puis sèche puis coule, puis sèche à nouveau.
Il paraît que les effets secondaires relatifs à la chimio se laissent encore ressentir durant deux ou trois mois .
Du côté des cheveux aussi, c'est lent. L'une d'entre nous avait les cheveux noirs et abondants. Elle peut déjà se promener en rue, tête découverte. Moi, quand je suis tête nue, c'est tête nue ! Une autre dame, plus âgée, qui a une longueur d'avance sur nous, a les cheveux dressés sur le crâne du fait de sa perruque, et un léger duvet sur les côtés. Mais si je pouvais déjà avoir ce duvet sur ma tête ! J'ai déjà parlé de celle d'entre nous pour qui ce sujet pose de vrais problèmes. Tous les jours, elle demande à ses enfants de vérifier avec elle si ça repousse. Ses sourcils repoussent à la même vitesse que les miens et elle m'a laissé voir sous son foulard : elle a quelques très longs cheveux plantés comme des antennes sur son crâne, mais une dizaine seulement ; les autres sont comme les miens, tout transparents et mini-rikikis. Il paraîtrait que les cheveux repousseraient d'un centimètre par mois… Mais j'ai toujours eu les cheveux plus lents que les autres. J'espère avoir six centimètres dans un an, pour être sûre de ne pas être déçue.
Est-ce parce que j'ai entendu dire que j'aurais des cheveux plus épais et bouclés que je suis si curieuse? Franchement, oui, je suis infiniment curieuse et impatiente.
Je crois aussi qu'inconsciemment, j'associe guérison et repousse… et je suis évidemment pressée de me sentir guérie.

Pour mes fils, mes fluctuations d'énergie sont aussi difficiles à gérer que pour moi-même. Peut-être parce que je lance des signaux contradictoires ? Ils se basent sur ce qu'ils voient et en tirent des conclusions sur une base linéaire et logique.
A qui demande de mes nouvelles, ils disent "Maman est beaucoup plus souvent absente, donc elle va mieux". Effectivement. Mais ils n'ont pas l'air d'avoir compris que je m'absente pour aller à la radiothérapie.
Ils ne savent pas non plus que je ne dors pas du sommeil du juste, parce que le Juste, lui, n'a pas de bouffées de chaleur la nuit ! Et qu'en conséquence, je dors extrêmement mal, me réveillant parfois plusieurs fois par heure.
Ils paraissent donc tout déroutés parce que le matin ils me voient en assez bonne forme, que je demande de l'aide dans l'après-midi et que je m'écroule tôt dans la soirée.
L'autre jour, un dimanche où il faisait si beau, ils sont partis sans message et sont restés absents jusque tard dans la soirée. Je leur ai laissé un mot devant la porte, leur demandant de ne pas faire de bruit en rentrant parce que je n'avais pas été bien et que je dormais. Depuis ce jour, ils font un peu plus attention à mon état de santé quotidien. Rien n'est simple, pour personne.

Fatigue. Spleen, irritabilité du caractère, colère… J'ai déjà vécu ce phénomène le week-end passé, et voilà que ça recommence. Pourtant, j'ai tellement besoin de changer d'air entre les tirs groupés de la radiothérapie. Et je suis raplapla le vendredi quand ma tête me dit "voilà, tu en es quitte pour trois jours".