Chimiothérapie

Dernière chimio… - p.1

Quand nous avons reçu le feu vert pour passer la dernière chimio (sixième), Tania et moi avons chanté "C’est la lutte finale… ".
J'envisageais deux alternatives : ajournement d’une semaine (parce que les globules n’étaient pas remontés dans les limites demandées ou parce que j’avais ce maudit rhume) ou chimiothérapie en date dite. Bien sûr, cette dernière option signifiait que tout allait bien sur le plan de l’état général…
Bien que je fusse dégoûtée à mort de cette saloperie, j’ai tout de même entonné ce chant, spontanément, sans y réfléchir. Les paroles étaient significatives. Elles sortaient tout droit de mon inconscient.
La lutte finale ! ! !
Je n'ai pas osé le hurler à pleins poumons, par respect pour les patients dans les salles d’attente proches -que vivaient-ils, eux, à cette heure de leur vie ? ? ?-, mais l’enthousiasme était total. Et tomba subitement en arrivant à l’hôpital de jour…. Beuuurrrrkkkk.
J’ai demandé à ne pas voir le produit rouge, cette fois-ci. Ni même rien voir du tout. Seulement par la fenêtre, le soleil et les nuages de printemps. Tania.
Je suis trop écoeurée.
Rien qu’à le consigner sur papier, j’ai des nausées. Le souvenir, simplement.
Je ne relirai pas souvent ce témoignage.
Me voici donc dans la dernière ligne droite. A part les premiers jours, où les nausées et vomissements m’ont gâché la vie, comme d'habitude, et la fatigue qui subsiste fondamentalement, je dois dire que je suis assez contente de ne pas avoir empiré par rapport à la cinquième. Aux derniers prélèvements, la plupart de mes paramètres sanguins sont remontés quasi à la normale, quand ils n’étaient pas devenus tout à fait normaux.
A ce moment, où je partage tout ceci avec vous, je suis à la phase d’immuno-dépression de ma dernière chimio. Les effets secondaires s’étendent jusqu’à la fin de cette période environ. Reste alors de la fatigue, mais moins harassante. Si je devais comparer, je parlerais une voiture qui démarre. Après ces trois jours de déficience immunitaire, mise en première vitesse. Et, de jour en jour, comme le moteur chauffe, les tours/minutes s’établissent dans un meilleur rapport. Le rendement devient de plus en plus intéressant.
Mais actuellement, immuno-déficiente, j’en suis là : point mort, une bielle coulée. Avec toute l’espérance d’une belle route en perspective.

J’aimerais dire que je suis complètement guérie, mais j’ai une amie qui est décédée tout en disant qu’elle était complètement guérie… Les récidives existent. Malheureusement. Et je ne peux m’empêcher d’y penser.

En essayant de blaguer, je dis que la chimiothérapie est volontairement aussi horrible pour s’assurer que personne n'ose faire la moindre récidive. Mais, cela n'a rien de drôle, hélas !
Actuellement, si je devais repasser par-là, je dirais que je n’y vais pas, que je préfère mourir. Pourtant, je vois bien que, de cure en cure, bien que je refuse de parler de la suivante22, par dégoût profond, à chaque fois j’y retourne, malgré tout. L’instinct de survie. Freud appelle cela la Pulsion de Vie. J’aime ce mot de "pulsion". Et, même si parfois elle me débecte complètement, quand je suis clouée au lit avec des nausées, j’ai toujours aimé la vie.