Le temps passe… la vie continue

Fin novembre. - p.1

Visite de contrôle chez la radiothérapeute. Mon congé de maladie est encore prolongé de trois mois, mais heureusement toujours pas d'inquiétude du côté du cancer. Elle a constaté que j'avais toujours "l'ombre77" de la radiothérapie dessinée sur la peau. Moi, j'appelais cette zone, "mon coup de soleil" !
Ma ménopause ne se passe pas trop mal, mais je reste très fatiguée. Ma sénologue pense qu'il s'agit peut-être encore de ma chimiothérapie, également. Quand je suis fatiguée, ce mauvais goût me revient encore à la bouche et ma vue baisse alors très sensiblement. Mes urines sont toujours jaune fluo et m'obligent à me lever plusieurs fois par nuit. Et j'ai toujours aussi mal aux articulations. Heureusement que ma kiné s'en occupe… Me voilà devenue une petite vieille de quarante sept ans, et rantamplan la vieille !
Je continue aussi à être légèrement immuno-déficiente, ce qui commence à devenir longuet.
Mon taux de globules blancs, rouges et de plaquettes était quasiment normal au moment de la fin de la chimiothérapie, légèrement trop bas après la radiothérapie… mais il n'est pas remonté depuis. Je suis donc de nouveau au régime boudin et os à moëlle, Thymotabs et Origanol, en espérant passer outre les épidémies de l'hiver.
Moi qui dois désintoxiquer mon foie des médicaments, j'en prends plus que jamais dans ma vie. Toutes sortes de reconstituants, vitamines et autres antidotes, en plus de mon hormonothérapie contrebalancée par des extraits de soja et des extraits d'artichauts en dragées.
Je ne prends plus de sucre, pour essayer de diminuer mes bouffées de chaleur, soulager mon foie, et contrôler mon poids. Cela suppose une nouvelle gestion alimentaire qui ne se fait pas sans difficulté : notre société a tellement l'habitude de manger ou boire sucré, au petit déjeuner, au goûter, de prendre un dessert, un chocolat chaud ou une limonade… Je me trouve donc quelques fois dépourvue d'idées, mais je me renseigne pour pouvoir m'installer dans ce régime à long terme, car je me sens mieux depuis que j'ai retrouvé mon poids de départ. Je me trouve donc aussi parfois en hypoglycémie, par manque d'habitude de ce régime.
De même pour l'alcool… ce qui rend difficile l'art d'être discrète sur ma maladie quand je suis en société, parce que les alcooliques me regardent comme un rabat-joie ou comme si j'avais une cyrrhose ! Et à mon âge, en société, autour d'un repas, lever le coude est une activité en soi, voire un signe de raffinement culturel au niveau de la conversation.

Mes cheveux repoussent lentement mais sûrement. Mes amis me disent depuis lors, et encore, et toujours, que "ma coupe me va si bien", que je "dois garder mes cheveux courts", que je "devrais les recouper comme au début, parce que ça m'allait si bien". J'apprécie le compliment et l'intention de gentillesse, mais ils ne savent pas de quoi ils se mêlent. Je n'ai pas encore mis de ciseaux dedans. Et je les peigne seulement depuis peu, tellement ils sont courts encore… Mais il me semble que les couper me ferait mal au sein manquant. Je veux d'abord voir jusqu'où ils boucleront, comment je suis avec mes nouveaux cheveux aux différentes longueurs, et me laisser cicatriser le moral.
Je veux aussi d'abord apprendre à me reconnaître : ils sont très différents d'avant, me donnant un tout autre look : beaucoup plus drus, légèrement plus foncés. Blond châtain avec de magnifiques reflets lumineux qui continuent à s'éclaircir.
Je me gratte continuellement le crâne, soit pour sentir dans ma main leur nouveau toucher, soit pour aider la repousse suivante à passer78. J'espère être débarrassée de ce tic prochainement, car voilà près de huit mois que cela dure !