Comment t’en es-tu rendue compte ?

A propos du dépistage systématique - p.2

Dans la salle d'attente de la radiothérapie, comme nous parlions justement de la survenue de notre "boule" au sein et que, toutes les trois, nous avons eu un cancer invasif, nous avons chacune souligné à quel point nous avions dû nous imposer dans l'agenda du médecin. Toutes les trois, nous avons dû obliger la secrétaire, à force de persuasion, à nous accorder un rendez-vous plus rapproché.
Lutter pour sa survie commence dès la prise du premier rendez-vous.
Une de nous trois, et ce n'est pas la première personne que j'entends raconter une histoire pareille, avait pourtant fait une mammographie trois semaines auparavant, si bien que son médecin était récalcitrante à lui donner un nouveau rendez-vous en urgence…
Dans le doute, foncez ! Mieux vaut déranger pour rien que d'apprendre que votre sein ou je ne sais quel organe aurait pu être sauvé si vous étiez venue plus tôt.
Je suppose que vous vous rappellez que le premier rendez-vous proposé chez mon médecin habituel se situait en janvier alors que j'avais téléphoné en août. A un mois près (fin février), je terminais ma chimio ! J'aurais sans doute déjà été admise aux soins palliatifs ou pire, si j'avais attendu sagement -ou bêtement ? - après ce rendez-vous. Alors que, maintenant, je suis convaincue, avis des médecins à l'appui, que je suis sauvée.

Parfois il nous semble que la médecine ne sait pas grand chose sur le cancer. Elle a fait tant de progrès par rapport aux autres maladies effrayantes, en perfectionnant les vaccins et les mesures préventives, en éradiquant certains germes, en garantissant une guérison à haut taux de réussite sans la moindre séquelle, que nous aimerions la voir maîtriser celle-ci aussi, évidemment. Raison pour laquelle la recherche sur le cancer a si bonne presse, je suppose. Mais quand j'analyse cette question du savoir, je me rends compte qu'elle se pose sur plusieurs niveaux. Les médecins savent très exactement ce que j’ai eu. Ils ont tout-de-suite perçu l’urgence. Ils savent aussi qu’ils ont enlevé tout ce qu’ils pouvaient nettoyer et qu’en conséquence de leur beau travail, mon cancer est "parti " avec l’ablation du sein et des ganglions malades. Ils sont sûrs d’eux par rapport à tous ces faits. Mais ils ne savent pas pourquoi ni comment j’ai contracté cette poisse de maladie, ni comment peut évoluer mon cas personnellement. Ils savent comment soigner, mais ne savent pas si vous en guérirez. Ils ne savent pas non plus comment éviter de l'attraper, ni comment chaque malade va réagir aux différents stades de la prise en charge thérapeutique depuis l'annonce du diagnostic jusqu'à la rémission éventuelle, ni comment prémunir les populations…
Personnellement, je leur suis déjà très reconnaissante pour tout ce qu’ils savent et tout ce qu’ils ont fait pour me sauver des griffes de ce sale animal exponentiel. Je ne peux bien sûr pas leur reprocher de ne pas en savoir plus, même si je le regrette, pour moi et pour les autres…