Comment t’en es-tu rendue compte ?

A propos du dépistage systématique - p.1

Le dépistage précoce est une bonne initiative. Mais j'ai envie de faire quelques commentaires, parce que le mot prévention, dans le langage du grand public, ne couvre pas la même signification que dans le langage médical. Mieux vaut, à mon avis, parler honnêtement de "dépistage précoce", même si ce n'est pas une formule très Marketing. Quand ils parlent de prévention dans le cadre du cancer du sein, les professionnels parlent entre eux en termes de morbidité statistique 72(en français banal : chances de survie). Mais pour le commun des mortels, prévention, comme vaccination, signifie agir de telle ou telle manière (hygiène de vie, précautions, soins ou intervention bénigne) pour se protéger efficacement et durablement contre la maladie. S’offrir une garantie d’y échapper.
Or, actuellement, il n'existe aucun moyen de protéger efficacement ceux qui ont des raisons de se sentir prédestinés. Par exemple, ma sœur ne peut pas se prémunir contre le risque, alors qu'elle rentre, désormais, dans la population à suivre puisqu'elle a un antécédent familial. Il n’existe, pour elle, actuellement, aucune prescription qui lui permette de passer à côté, si elle doit l’avoir. Des dépistages plus nombreux ne la préservent en rien contre la maladie. Si elle doit l’avoir, elle l’aura… Espérons seulement qu'elle ne l'aura pas. Sinon, que le mal puisse être pris au plus tôt, de manière à ce qu'elle puisse être soignée à temps et assurer sa survie à long terme. Mais rien ne peut la garantir contre le cancer.
Le grand public croit que la prévention prémunit contre le cancer. J'en tiens pour preuve que plusieurs de mes amies m’ont demandé, parfois même de façon agressive (j’ai rompu les ponts avec elles), si je n’avais pas fait mes mammographies à heure et à temps. En espérant, sans doute, que, puisqu’elles font leurs mammographies très régulièrement, elles seront exemptées. Elles espèrent, sans doute, secrètement, que j’aie péché par négligence, pour se rassurer sur leurs propres chances.
Et pourtant, si ! ! ! Bon sang ! ! ! Bien sûr que j’ai fait mes mammographies, comme mes analyses de col et tout ce qui touche à la "prévention " en gynécologie. D'autant que je souffrais au bras, en plus !
Et je dirais que je faisais mes mammographies comme on va chez le dentiste dans les pubs pour la prévention dentaire : pour avoir le bonheur de m’entendre dire que je n’avais rien au sein ! Et je vivais pleine d’insouciance, d’ailleurs, puisque, de un, je n’avais rien au sein à la dernière mammo et de deux, comme je l’ai déjà dit, j’étais la dernière à qui cela devait arriver statistiquement.
Je pense que je ne peux rien me reprocher : dès que j’ai eu un soupçon, j’ai réagi (quasi-) instantanément. Je l’ai fait diagnostiquer dans les quinze jours, premier rendez-vous possible dans l’agenda surchargé des médecins, et traiter la semaine suivante, ce qui me paraît rapide. Cette colère de mon sein fut aussi inattendue et subite que toutes les colères du monde. Mais, je dois reconnaître que, si j’avais pensé aux risques liés aux métastases, j’aurais défoncé les portes…
Je peux aussi vous dire que durant ces quinze jours, je ne pensais qu’à ça, évidemment, jour et nuit, au boulot et partout, en m'observant avec anxiété, vérifiant "si ça ne grossissait pas". Or, mon médecin homéopathe, à qui j’ai montré ma boule l'avant-veille de mon rendez-vous chez la sénologue, m’a dit de ne pas y toucher constamment. Mais que faites-vous quand vous avez un bouton73 quelque part ? Je ne sais pas si cette inquiétude relative au fait de manipuler une masse tumorale est fondée ou non. Mais, dans le doute, abstiens-toi. Et, donc, pour ne pas avoir à y toucher pour se rassurer… allons au plus tôt chez le médecin compétent pour le diagnostic. D'autant que, de fait, même si la masse tumorale ne grossit pas, le cancer se développe aussi par métastases…