La chimiothérapie n’entraine pas de troubles psychologiques !

Solitude face à la mort, à la souffrance - p.1

J'ai déjà expliqué combien, pour moi, une bonne solitude valait mieux qu'une mauvaise compagnie. Mais parfois, bien sûr, j'ai craqué.
De plus, je n’ai jamais eu peur de la mort. Même petite.
Je ne me suis donc pas trouvée bouleversée par une angoisse exagérée relative à ma propre mort. Je suis seulement très touchée du chagrin que je vais provoquer autour de moi, soit par ma maladie, soit par quelque issue fatale qu’il est normal d’envisager comme possible.
Le plus éprouvant, bien sûr, se vit dans le choc et l'incertitude des premières heures, des premiers jours… où le diagnostic est encore incomplet et à attendre, où tout pronostic est encore impossible.
Mais je sais, par l’expérience de Petra, de Paula et d’autres, que ce sentiment d’abandon, de solitude, cette angoisse de mourir peuvent être extrêmement pesants. Je ne peux pas en dire grand chose parce que ce ne fut pas mon expérience. Mais si vous connaissez un chimioke, il a peut-être besoin de cette chaleur qui permet de dépasser l'angoisse de solitude et de mort.
J'ai entendu dans une émission qu'il est souvent difficile aux proches de parler du cancer avec le/la malade de peur de blesser, par crainte d'impudeur ou pour éviter d'ajouter ses propres sentiments aux soucis de l'autre. Ou encore parce que la famille n'est pas toujours équipée pour rattraper la sauce, au cas où se rompraient les digues de la dépression, de l'angoisse, du dégoût de vivre…
Si vous êtes dans cette situation, j'ai plusieurs fois entendu dire que les psychologues de l'hôpital ou les médecins se tenaient à la disposition des familles pour les aider à entourer leur malade ou à comprendre. Ma sénologue a toujours eu le souci de cette communication entre mes fils et moi. Elle appréciait aussi que je sois accompagnée de copains ou de Tania. La solitude, dans ces moments-là, ravage autant qu'un poison. Il vaut mieux ne pas la laisser flirter avec la maladie.

Comme Petra a toujours tendance à souffrir de la solitude, même habituellement, et que cette expérience aggrava encore sa souffrance, je pense opportun de parler des remèdes qu'elle m'apporta en cadeaux, pour m'aider à y faire face. Signes, à demeure, qu'elle pense à moi, au-delà de la distance géographique, et que je pense à elle, sans doute.
Dès le départ, elle m’a donc donné de jolies cartes postales pour me tenir compagnie en fonction de mon humeur les jours normaux (photo de cailloux de couleur ocre), les jours très tristes (une ourse polaire qui fait la sieste au soleil, entourée de ses deux oursons turbulents : moi/elle et mes/ses enfants ???) et les jours un peu tristes (blé en herbe). Ces cartes sont riches en symboles. Elle les a achetées dans un kiosque à journaux en pensant à ce qu'elle avait vécu. Elle m'a dit "quand tu es triste ou que tu te sens trop seule, tu mets cette carte devant toi". J'ai mis l'ourse polaire en permanence…
Elle m'a aussi dit de faire brûler des bougies pour compenser l'absence de lumière chaude durant l'hiver. Et j'ai donc installé mon poisson rouge, un superbe voile de Chine (présence, mouvement, beauté) sur la table du salon, près de mon coin-confort, avec les bougies (chaleur, beauté), des fleurs ou une plante, en attendant le printemps. Seule, avec un bon bouquin, une tasse de "bon thé", je peux rester quelques heures dans une (semi-) "méditation bénéfique"33. Les mouvements gracieux et les bulles de mon poisson me tenaient mieux compagnie que n'importe quelle émission de TV.
Le conseil de Petra, de veiller à s'installer un coin chaleureux pour le confort moral et physique en valait la peine, d'autant qu'il convient autant aux personnes vivant seules qu'aux personnes accompagnées.
Quand j’ai envie de paix intérieure ou que je suis triste, je prends le yogiman qu'elle m'a offert et le caresse. Curieusement, cela me fait beaucoup de bien.
J’ai pensé qu’un doudou, une peluche ou quoi que ce soit qui compense le besoin de câlins, de réconfort dans l’enfance peut convenir. J’ai un peu parlé des régressions par lesquelles nous passons. Nous pouvons avoir une source de consolation cachée sous la couette ou sous l’oreiller. Pour pouvoir se consoler soi-même, à défaut de pouvoir l'être en continu par les autres.